Constantin I: émission lyonnaise inédite

Bonjour les amis. Je me propose d'envoyer ce petit projet d'article à CGB.
Toute remarque de votre part visant à le corriger d'éventuelles erreurs ou à l'enrichir sera la bienvenue !
La disproportion des images est liée à l'éditeur de texte du site: elle n'apparaîtra pas dans la version finale.


Après sa victoire sur Maxence en 312, en digne successeur d’Aurélien à cet égard, Constantin promeut le culte unificateur de Sol Invictus et lance une émission monétaire massive célébrant cette divinité, créant à cette occasion le solidus.



Régnant dorénavant sur l’ensemble de la partie occidentale de l’Empire, il décline ce thème à l’envie dans de nombreux ateliers jusqu’en 320.


La promotion de ce culte se parachèvera le 7 mars 321 par le décret fixant le « jour du soleil » (notre dimanche) comme jour de repos hebdomadaire (1).

Le type emblématique en est le SOLI INVICTO COMITI (S.I.C.) au Sol debout, dont les émissions successives de nummi se distinguent généralement par des lettres ou signes de champ disposés de part et d’autre de Sol: -/-, A/-, P/-, A/S, S/F, T/F, F/T, C/S, T*/F, TF/*, M/F, R/S, R/F, *, ᴗ/-, ᴗ /* …

En 316, peu avant sa fermeture provisoire pour deux ans, l’atelier de Lyon émet la série A/S (Augusti Securitas ?) que l’on considérait jusqu’à présent comme la dernière émission du type S.I.C. pour cet atelier.


On notera sur cet exemplaire la césure de revers INVI-CTO qui, bien que normale sur les émissions d’avant la réforme de 313, est tout à fait exceptionnelle pour les émissions lyonnaises suivantes. Dans la base nummus-bible (3), qui ne recense que les monnaies postérieures à la réforme de 313, on ne dénombre qu’une demi-douzaine d’exemplaires présentant cette césure sur près de 500 exemplaires S.I.C. lyonnais : 99% d’entre eux présentent la césure où le C précède le visage de Sol (4).

On connaissait par ailleurs une monnaie présentant les lettres inversées S/A : celle de la collection Voetter réf. n°67.864 au musée de Vienne (Bastien n°613), mais s’agissant d’un unicum on pouvait supposer que le graveur du coin avait inversé les lettres par erreur.
Or, dans les deux dernières décennies, deux autres exemplaires ont fait leur apparition sur le marché, qui seront inclus dans le supplément III du Bastien :



Ce troisième exemplaire présente la rare césure INVI-CTO.

On n’a identifié aucune liaison de coins pour ces trois exemplaires, ce qui permet d’éliminer l’hypothèse d’une erreur de graveur: nous sommes donc probablement en présence d’une ultime et très courte émission S/A réalisée par l’atelier juste avant sa fermeture. Cette inversion de lettres de champ aura permis de la distinguer de la précédente sans en changer le message politique, à l’instar des émissions F/T et T/F.

Olivier GUYONNET

(1) Code Justinien 3.12.2
(2) Le R.I.C. indique une titulature erronée pour cette référence (sans le IMP) : RIC 57 = RIC 53 (Bastien Lyon 294-316, note 3 p. 258)
(3) https://www.nummus-bible-database.com
(4) L’affirmation de Cloke & Toone selon laquelle la césure des S.I.C. serait simplement liée au design de l’allégorie ne s’applique probablement pas à tous les ateliers. On notera par exemple que les césures des ateliers de Ticinum et Siscia sont constamment les mêmes : INVI-C-TO à Ticinum et INVI- -CTO à Siscia.

Parfait et très clair

Concernant le culte de SOL dont la persistance peut poser question sachant que CONSTANTIN s'est converti , un article intéressant donnant un point de vue, qui sans nier l'aspect important de SOL jusque tard dans le règne de CONSTANTIN, y voit plus une valeur symbolique , et que c'est pour manifester une foi Chrétienne qu'il crée le repos dominical.

https://www.cairn.info/revue-grief-2015-1-page-138.htm

extrait pages 11 et 12 :

"Bref, une lecture attentive des lois de Constantin concernant le premier jour de la semaine ne laisse guère la place au doute : une telle mesure a été inspirée par la foi chrétienne de l’empereur. On ne saurait négliger bien sûr les multiples références à la divinité païenne Sol qui ont marqué tout le règne de cet empereur : la référence est indiscutable sur les émissions monétaires qui, jusqu’en 324, le représentent couronné par le « soleil invaincu », désigné comme « compagnon » de l’Auguste régnant. De 328 à 330, Constantin se fait encore représenter avec les attributs d’Apollon dans sa capitale, tandis que l’éloge qui lui est adressé pour ses trente ans de règne par l’évêque Eusèbe de Césarée le compare également à Apollon sur son char tiré par les quatre Césars, ses héritiers  [18]
[18]
Voir I. Tantillo, « L’impero della luce. Riflessioni su…. Cependant, cette « religion solaire » est avant tout un langage symbolique (omniprésent), elle n’est pas l’expression d’une foi  [19]
[19]
Ibid., p. 1047.. Et c’est bien parce que Constantin s’est converti au christianisme qu’il introduit un jour de repos hebdomadaire, comme le souligne enfin l’évêque Eusèbe de Césarée en dressant le bilan du règne dans sa Vita Constantini :

12
Il prescrivit que l’on considérât comme le jour convenable pour les prières celui qui est vraiment fixé pour cela et qui est le premier, le jour du Seigneur et du salut… 2. C’est pourquoi il ordonna par une loi à tous ceux qui vivaient sous la puissance romaine d’être de loisir (skolèn agein) les jours portant le nom du Sauveur et d’honorer semblablement ceux du sabbat, en commémoration, me semble-t-il (moi dokeîn), de ce que notre commun Sauveur a accompli ces jours-là et dont on fait mémoire. 3. Il donna instruction à toutes ses armées d’honorer avec zèle le jour du salut, qui se trouve (sumbainei) tirer son nom de la lumière et du soleil [je souligne]"

Merci pour ce bel article.

Un second argument est la présence de monnaies avec un buste A*2. Un exemplaire est rapporté par Bastien (n 612). En voici un second en piètre état.



Le coin de revers est différents des deux exemplaires du Bastien. Si tu le souhaites je peux essayer de faire de meilleurs photos.

Merci Limes. Je citerai cet article dans le mien.

tolstoi a écrit:Merci pour ce bel article.

Un second argument est la présence de monnaies avec un buste A*2. Un exemplaire est rapporté par Bastien (n 612). En voici un second en piètre état.

Peux-tu développer? Je n'ai pas vu le lien avec l'émission A/S ou S/A.

tolstoi a écrit:Merci pour ce bel article.

Un second argument est la présence de monnaies avec un buste A*2. Un exemplaire est rapporté par Bastien (n 612). En voici un second en piètre état.



Le coin de revers est différents des deux exemplaires du Bastien. Si tu le souhaites je peux essayer de faire de meilleurs photos.

Wow super Si tu avais le poids et le diamètre que je rajoute cette monnaie à ta collection dans la base

Pardon, sans le Bastien sous les yeux mon commentaire est probablement peu compréhensible.

Dans son ouvrage, Bastien rapporte deux monnaies de l’ émission S/A PLG:
Numéro 612: CONSTANTINVS P F AVG , buste vu de 3/4 arrière (1ex.)

Numéro 613: CONSTANTINVS P F AVG, buste cuirassé à droite (1 ex.)



Le trésor de chitry apporte 2 nouveaux exemplaires pour le numéro 613 et la monnaie que je te présente est le second exemplaire Bastien 612. Ma monnaie est d’ailleurs du même coin de revers que la 613b.

(Elle fait 19mm et 2.39 g).

Merci pour ces précisions

Limes13 a écrit:Concernant le culte de SOL dont la persistance peut poser question sachant que CONSTANTIN s'est converti , un article intéressant donnant un point de vue, qui sans nier l'aspect important de SOL jusque tard dans le règne de CONSTANTIN, y voit plus une valeur symbolique , et que c'est pour manifester une foi Chrétienne qu'il crée le repos dominical. (...)

Petite précision importante : Constantin n'a eu aucune peine à reconnaître le repos du dimanche comme étant le "Jour du Seigneur", puisque c'était déjà un jour consacré au "Sol invictus" instauré par Aurélien en 274 ! Sa conversion au christianisme était une manœuvre diplomatique visant à s'attirer la sympathie des nombreux convertis tant dans l'armée que dans la population. Habile diplomate qu'il était, il a tout simplement christianisé un jour de repos hebdomadaire païen, car le vrai jour de repos de la foi chrétienne du début était le shabbat (samedi) !
Bien à vous.

merci Jacquy pour cette précision.

Sur la conversion de CONSTANTIN, et la persistance du culte de SOL , un autre  point de vue, celui de Lucien JERPHAGNON dans son "Histoire de la Rome antique " :
aprés avoir souligné que CONSTANTIN n'avait pas besoin de prendre le risque de se mettre à dos les occidentaux , encore paiens en majorité ( les chrétiens étant plus nombreux en Orient), livre son analyse dont j'ai extrait des passages:
" cet Illyrien sans grande culture comme sans grande préoccupations métaphysiques était engagé à cent pour cent dans les croyances de son siècle..............Question Credo je ne pense pas qu'il ait été bien regardant.Jadis adepte comme ses ancètres du culte solaire , il est possible qu'il ait mêlé toutes ces dévotions............Au fond ce dieu suprême assisté du Soleil Roi , et ce dieu père assisté de son fils Christus ne se distinguait pas au premier coup d'oeil. les Chrétiens eux-mêmes ne se génaient pas pour représenter Christus sous les traits d'Apollon Helios conduisant son char...........
Constantin aura t-il superposé les différentes images ,identifié à ce Christus , la divinité unique ( Sol) à la quelle se référaient tous les syncrétismes de l'époque.........? .... C'est ce que j'imagine de plus probable pour rendre compte d'une conversion aussi sincère, que confuse".

Il doit y avoir d'autres points de vue..... c'est ce qui est intéressant

On ne peut que conseiller à chacun de lire ou de relire les ouvrages de ce regretté philosophe-historien! Absolument génial et passionnant!!!!

Dans le prolongement, cet entretien de Pierre MARAVAL, est passionnant :
https://www.youtube.com/watch?v=-BiTwVQZuVM